Parkings pleins: «Il faut plus de places!»

Plusieurs ouvrages sont souvent saturés. C’est le résultat d’une stratégie politique. Le Touring club suisse demande de maintenir le nombre de places à un niveau acceptable.

  • Pas facile de trouver une place dans les ouvrages de la Fondation des parkings, dont certains sont régulièrement complets. TR

    Pas facile de trouver une place dans les ouvrages de la Fondation des parkings, dont certains sont régulièrement complets. TR

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Samedi, 10h, parking Saint-Antoine, aux portes de la Vieille-Ville. Le panneau lumineux à l’entrée de l’ouvrage est clair, il indique qu’il ne reste aucune place disponible pour les automobilistes, ces derniers sont contraints de rebrousser chemin et de trouver une autre solution. «C’est inadmissible! Avant, je pouvais me rabattre sur les parkings couverts quand je galérais trop dans les rues. Maintenant, même comme ça, je ne suis plus sûr d’en dénicher une et je termine souvent par me garer n’importe comment. Pourquoi ne cherche-t-on pas une solution?», s’énerve Robin, avant de repartir en direction du parking de Rive.

Derrière lui, Tamara est moins polie. Après une salve de noms d’oiseaux dédiés à différents élus, la sexagénaire accuse. «Notre canton est devenu antibagnole. On a de plus en plus l’impression que l’automobiliste est un indésirable, un ennemi à chasser. Que ce soit aux Eaux-Vives ou à Plainpalais, c’est la galère. Alors, la moindre des choses serait de trouver des places dans les parkings en intérieur!».

Taux de remplissage de 81%

Une situation loin d’être un cas isolé. Dans différents quartiers, les ouvrages de la Fondation des parkings sont régulièrement pris d’assaut, au point d’être saturés. En plus de Saint-Antoine, c’est par exemple le cas au P+R Etoile (Lancy) et à Sous-Moulin (Thônex). Suivent les P+R Genève-Plage et Moillesulaz, eux aussi ponctuellement pleins. «Nous avons constaté une augmentation générale de l’utilisation de nos parkings depuis la fin de la pandémie. En 2022, le taux moyen de remplissage de l’ensemble de nos ouvrages se situait à 81%», confirme Emmanuelle Merle, responsable de la communication auprès de la Fondation. Mais que faire pour améliorer la situation? «Afin d’éviter la saturation, nous pouvons intervenir sur les conditions d’accès et sur les tarifs. C’est ce que nous avons récemment fait au P+R Etoile, où les tarifs visiteurs en heures pleines ont été augmentés», répond Emmanuelle Merle. Une manière de limiter le temps d’utilisation des parkings et privilégier une meilleure répartition entre les ouvrages. Résultat: des parkings plus onéreux, mais avec davantage de places disponibles pour les usagers ponctuels.

Des leviers qui pourraient être actionnés prochainement, l’objectif des autorités étant d’inciter les usagers à opter pour ces places payantes, même si elles sont plus chères. «Notre mission est effectivement de favoriser le stationnement en ouvrage afin de libérer l’espace public. Ainsi, les usagers vont directement se parquer en souterrain, plutôt que tourner en surface à la recherche d’une place ou déplacer leur voiture régulièrement, ce qui péjore la fluidité du trafic.»

TCS inquiet

Une réalité qui inquiète le Touring club suisse (TCS), pour qui le nombre de places doit être maintenu à un niveau acceptable. Dans le viseur de l’association: les suppressions de places en extérieur et leur compensation en ouvrages, jugée insuffisante. «Une place supprimée doit être compensée», estime pour sa part Yves Gerber, directeur de la section genevoise du TCS. L’association pointe la modification de la loi genevoise sur la circulation routière en 2020, qui permet de ne pas remplacer toutes les places. Résultat: sur les 22'300 emplacements à supprimer, 2300 ne seront jamais compensés. (lire encadré).

Autre problème: les tarifs pratiqués pour pouvoir se garer en ouvrage. «Aujourd’hui, de nombreux parkings coûtent 150 francs par mois pour les résidents, soit 1800 francs par an. En comparaison avec un macaron, qui coûte 200 francs pour une année, cela paraît démesuré, même si la Fondation a déjà fait un effort important. Et cela s’apparente à une mesure antisociale, face à laquelle les plus précaires ont de la peine à faire face. Les retraités, par exemple, n’ont pas toujours cette somme en plus. Après une période de démocratisation de la voiture, ce moyen de transport redevient aujourd’hui un bien de luxe», déplore Yves Gerber.

Pour le TCS, des solutions existent toutefois. «Nous ne pouvons pas nous limiter à compenser les places supprimées. Il faut en créer des supplémentaires, en fonction du lieu et de l’offre disponible, avec des prix adaptés. Les récentes enquêtes montrent que la voiture reste le moyen de transport principal en Suisse. Les conducteurs méritent d’avoir des aménagements dignes de ce nom», conclut le président du Touring club.

«4200 places libres dans 110 parkings»

TR • Interrogé sur les inquiétudes du TCS, le Département des infrastructures se veut rassurant. «Seule une petite proportion de parkings publics est régulièrement pleine. Selon nos statistiques d’occupation, près de 2500 places dans 19 parkings publics sont habituellement disponibles. Si l’on rajoute les disponibilités dans les ouvrages privés de l’Etat et de la Gérance immobilière municipale, ce chiffre s’élève à plus de 4200 places dans 110 parkings», informe Karen Troll, chargée de communication.

Le Canton, qui reconnaît que des places de stationnement vont bien être supprimées au gré des projets, rappelle que ces changements sont strictement régis par la Loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière et son règlement (RaLCR). «Le principe de compensation prévoit que toute place de stationnement supprimée en surface dans le périmètre de la compensation doit être compensée, sauf dérogation, explique Karen Troll. A l’inverse, tout nouveau projet de parking en ouvrage doit supprimer un nombre équivalent de places sur voirie. L’offre de référence (22'289 places) doit être maintenue par ce principe. Cela a permis de réaliser des projets de transports collectifs, d’aménagements cyclables, d’espaces publics etc.»